Adaptation optimale en entreprise

L’entreprise à la loupe

Aménagement de l'espace, communication, entretien d’embauche… Maud Gourtay-Saussaye, psychologue spécialisée dans les thérapies comportementales et cognitives, revient sur les points d’achoppement en entreprise pour les personnes Asperger qui peuvent trouver de nouvelles lignes stratégiques…

Les aménagements envisagés dans un open space sont-ils efficients pour une personne Asperger ? 

Maud Gourtay-Saussaye : L'open space présente une problématique particulière pour les personnes Asperger. Sa configuration alimente des bruits parasites, moins aisés à gérer qu’un volume sonore important. Les facultés cérébrales des Asperger vont être sensibilisées à l’extrême. Les frottements de vêtements, les claquements de talons répétitifs sur le sol, une personne qui jouerait avec son stylo en le faisant cliqueter... Autant d’interférences qui finissent par épuiser. Avoir des périodes de travail en équipe est tout à fait gérable, mais il faut des moments de pause dans un bureau totalement seul (et non vitré) pour permettre au cerveau de réinvestir le travail et récupérer de la fatigue. L'open space ne sera pas tenable à long terme. Un bon indicateur pour la personne est de se remémorer l'école, qui est une très bonne mise en situation d'open space sur des délais plus courts. Demandez-vous si cela vous semble gérable de 8h à 18h ?

Comment sont perçus les Asperger par les autres collègues ? 

Maud Gourtay-Saussaye : Ils sont souvent perçus comme "étranges", ce qui est une réaction normale du cerveau qui va appréhender une différence sans l'expliquer. Le problème reste que pour beaucoup, tout ce qui est nouveau, différent, fait peur, donc fait fuir. Plus vous expliquez votre mode de fonctionnement, plus vous donnez du sens à votre manière de faire, plus les autres seront en capacité de le gérer et donc de revenir vers vous. Parfois quand vous êtes oppressé par quelqu'un, la manière de lui dire peut être directe et donc abrupte. Si vous avez déjà exposé qui vous êtes, les gens comprennent qu'il n'y a aucune arrière-pensée et peuvent répondre calmement, sans se sentir agressés. Souvent, la logique est de vivre caché, comme si le fait de ne pas en parler pouvait rendre la différence invisible, alors que c'est souvent l'inverse. Il est stressant de révéler ce qui est de l'ordre de soi et de l'intime, de son fonctionnement, mais très rapidement les collègues l'intègrent pour ne plus avoir à en parler.

Une thérapie comportementale et cognitive (TCC) présente-t-elle un intérêt pour préparer un entretien d’embauche ?

Maud Gourtay-Saussaye : une TCC ou une personne dans l'entourage qui sera totalement honnête… Il n'y a pas de soins à gérer, donc le psychologue n'est pas une obligation. Mais il faut quelqu’un qui soit capable de faire un retour clair et précis de ce qu'il observe. Quand vous préparez l'entretien, la personne qui vous guide et vous entraîne doit vous dire tout ce qu'elle perçoit et voit, comme cela, vous pourrez trouver la bonne posture à tenir, ce que vous souhaitez montrer lors de l'entretien et non les stigmates du stress que ce moment de jugement, avec toute l'attention centrée sur vous, pourrait vous causer. Mais je pourrais dire exactement pareil pour tout type de profil ! Un entretien se prépare. Un patron n'attend pas de savoir qui l’on est dans notre globalité, mais qui nous sommes dans notre travail.